Par Jeff Kosi, Entrepreneur, Rédacteur en chef de Startup-agenda.com
Les 25 et 26 septembre derniers, la capitale française était le théâtre de l’événement tant attendu, Big Data & AI Paris 2023. Lors de cette occasion, Luc Julia, le directeur scientifique émérite de Renault, a pris la parole pour éclairer les participants sur les « Promesses et réalités de l’IA générative. » En tant que spécialiste de renom en intelligence artificielle, il a plongé au cœur de ces outils révolutionnaires, tant dans leur application chez Renault que dans les limites qu’ils imposent. Un regard incisif sur ces technologies qui secouent l’univers de l’entrepreneuriat.
L’IA générative : une évolution, non une révolution
Luc Julia, l’auteur du livre provocateur « L’intelligence artificielle n’existe pas, » est catégorique : l’intelligence artificielle est un terme mal choisi. Il précise que « l’intelligence » a été associée à tort à ces machines, mais cette appellation est maintenant solidement ancrée dans le langage commun. Toutefois, il trouve que pour les IA génératives, l’adjectif « génératif » est plus approprié. En effet, des IA telles que ChatGPT ou Midjourney ne créent pas, elles génèrent. La créativité reste l’apanage de l’humain, avec les IA génératives servant à « exacerber votre créativité. »
Luc Julia souligne qu’il s’agit d’une évolution majeure dans la manière dont nous créons des outils. La véritable révolution réside dans l’accessibilité de ces technologies. Les données du cabinet Gartner, présentées chaque année, montrent que les attentes autour des IA génératives sont à leur apogée. Cependant, selon Luc Julia, elles amorcent déjà une descente : « Nous savons qu’il y a un moment de désamour, puis nous trouvons des applications dans le domaine professionnel. » Chez Renault, les designers ont rapidement adopté ces outils, avec une facilité déconcertante. Luc Julia le constate en précisant que « l’apprentissage de Photoshop était bien plus complexe que l’apprentissage de Midjourney. » Les fonctions de support, qu’il s’agisse de la rédaction de contrats, de la traduction ou de la génération de manuels, font désormais appel aux IA génératives.
Cependant, des limites subsistent…
Mais malgré leur utilité indéniable, ces IA génératives présentent des limites importantes. Luc Julia met en garde : « Les IA génératives peuvent très bien inventer ! Elles créent de manière convaincante des références totalement erronées. » Il prend en exemple un avocat américain qui a fait rédiger sa plaidoirie par une IA, incluant des jurisprudences inexistantes. Luc Julia fait également référence à Bard, l’IA à laquelle il a confié la rédaction de sa biographie : « Toutes les dates qui y figurent sont fausses. L’IA vous induit en erreur en accumulant des données provenant de toutes sources, quelles qu’elles soient. »
La confiance totale en ces IA génératives est donc inenvisageable. À Hong Kong, une université a récemment tenté de mesurer la pertinence de GPT 3.5, l’un des modèles de langage d’OpenAI. Ils ont soumis vingt bases de données regroupant des millions de faits réels à ChatGPT pour évaluer leur véracité. Le résultat est déconcertant, avec une pertinence de ChatGPT ne dépassant que les 64%.
En somme, les IA génératives offrent un potentiel indéniable, mais elles exigent un discernement constant. Leur rôle est d’accompagner et de stimuler la créativité humaine, mais il est essentiel de ne pas perdre de vue leurs limites pour les intégrer de manière judicieuse dans le monde de l’entrepreneuriat et des technologies de l’information.